Idée reçue : la CGT ne signe jamais d’accords
dimanche 24 septembre 2023
Si la CGT refuse d’apposer sa signature aux accords considérés comme régressifs pour les travailleurs, sur le terrain elle n’hésite pas à valider 84% des accords d’entreprise. Un chiffre stable depuis de nombreuses années.
Contestataire ? Qui claque la porte ? A rebours de l’image souvent véhiculée de la CGT, la centrale signe en réalité de nombreux accords sur le terrain. D’après le dernier bilan sur la négociation collective, en 2021, la CGT a approuvé 83,7 % des accords en entreprise, contre 90,1 % pour FO et 93 % pour la CFDT. « A partir du moment où les propositions vont dans l’intérêt des travailleurs, on signe, confirme Nathalie Bazire, négociatrice de l’accord sur le 1% logement cosigné par la CGT. On valide beaucoup plus d’accords que certains ne le pensent dans les entreprises. Souvent on dénonce, mais on ne communique pas suffisamment quand on signe. On apparait comme le syndicat qui est contre tout. »
En région Bretagne, en 2022, la CGT a même approuvé 100% des accords portés dans les entreprises de moins de 50 salariés. « La CGT qui claque la porte, qui fait grève avant de négocier, c’est un lieu commun. Ce n’est pas ce qu’on observe sur le terrain », constate Jérôme Pelisse, chercheur au centre de sociologie des organisations (CSO). La lutte menée au printemps par la CGT aux côtés des travailleurs de Vertbaudet est très emblématique de la ligne CGT. Non signataire de l’accord sur les NAO qui n’octroyait que des primes, la CGT a obtenu après plus de deux mois de grève la signature d’un important accord salarial, avec 90 à 150 euros net d’augmentations. « Signer un accord dans lequel il n’y a rien, ça n’a aucun intérêt. Ce qui s’est passé à Vertbaudet est exemplaire, » se félicite Amar Lagha, secrétaire général de la CGT Fédération commerce et services.
Pied dans la porte
L’an dernier, cette fédération a mis un gros coup de pression sur les négociations de la branche Prévention Sécurité. « Le Medef proposait 3,2% d’augmentation, et des organisations étaient prêtes à signer. En faisant valoir notre droit d’opposition, on a obtenu 7,5%. Soit quatre points en plus », rappelle le dirigeant syndical. Si la CGT n’a pas signé l’accord, insuffisant face à l’inflation, elle a fait progresser la discussion. « Ce n’est pas parce que le syndicat ne signe pas qu’il n’est pas acteur et ne fait pas bouger les lignes. Ce que la CGT porte peut être repris par d’autres à l’issue des négociations, » observe Jérôme Pelisse.
Mais au niveau national, l’organisation se heurte à des négociations plus difficiles à faire aboutir. « Dans les branches, le patronat est uni, et on a plus de mal à s’entendre avec les autres syndicats », relève Amar Lagha. Si la CGT a refusé de signer en février l’Accord National Interprofessionnel (ANI) portant sur le partage de la valeur, jugé régressif, elle a sorti le stylo en mai pour parapher celui sur les accidents de travail et les maladies de professionnelles. « La CGT ne signe jamais de régressions sociales, précise Jérôme Vivenza, négociateur pour la centrale de l’accord national. Et un accord, ce n’est pas un traité de paix. Cela ouvre des chantiers avec des zones de conflits qui vont pouvoir être abordés avec le patronat ».
La fameuse technique du pied dans la porte.
Article paru dans La Vie Ouvrière -Ensemble septembre 2023
Le 16 mai 2023, les partenaires sociaux ont signé un accord de branche AT/MP sur les accidents du travail et les maladies professionnelles qui abaisse à 20 % le taux d’incapacité autorisant l’accès à la reconnaissance des pathologies professionnelles hors tableau figé depuis vingt ans. Le texte va permettre le recrutement de 20% d’ingénieurs conseils en plus dans les Carsat, les interlocuteurs des salariés du régime général de la Sécurité sociale. La CGT, signataire, estime que l’accord « consolide la gouvernance paritaire du système d’indemnisation. »